Analyse 2007-08

Le rôle des grands-parents n’est pas toujours facile aujourd’hui, face aux familles qui se séparent et qui se recomposent. Pourtant, ils constituent souvent un élément de stabilité important pour leurs petits-enfants. Comment se comporter pour que les petits-enfants en tirent le meilleur bénéfice ?


On ne choisit pas de devenir grands-parents


Dans la plupart des cas, les personnes considèrent comme une chance et comme un cadeau le fait de devenir grands-parents, même s’ils ne l’ont pas choisit. En effet, si l’on choisit son conjoint, si l’on choisit de devenir parent et d’avoir des enfants, on ne choisit pas ses beaux-enfants et on ne choisit pas non plus de devenir grands-parents. Du jour au lendemain, de manière parfois abrupte, les personnes se retrouvent confrontées à une nouvelle fonction à laquelle ils ne sont pas toujours préparés. Habituellement, les enfants ont évidemment tenu leurs parents au courant de cette naissance prochaine, mais quand ils se retrouvent avec le bébé dans les bras, ils se rendent compte que quelque chose d’assez indéfinissable s’est passé et ne savent pas trop où cela va les mener. Il arrive pourtant que certains grands-parents ne soient pas heureux de l’être, car ils sont éloignés de leurs enfants ou entretiennent de mauvaises relations avec eux. Certains sont blasés par la vie et ne s’intéressent pas aux petits. D’autres encore sont « usés » et ne savent plus faire face à la vitalité des enfants. Certains voudraient être plus disponibles pour s’occuper de leurs petits-enfants mais n’en trouvent pas le temps.


Grand-parent aujourd’hui


Les grands-parents d’aujourd’hui ne correspondent plus à l’image du passé. Les historiens [1] ont montré que le rôle des grands-parents dans la famille a évolué parallèlement avec l’augmentation de l’espérance de vie et que c’est dans la bourgeoisie du dix-neuvième siècle qu’a commencé à se apparaître et à se développer une image de grands-parents tendres et proches de leur petits-enfants. L’image des grands-parents était hier celle de personnes très âgées. Aujourd’hui, ils sont encore le plus souvent jeunes et sportifs, ils voient du monde et ont des activités sociales, extérieures à la famille. S’ils sont retraités sur le plan professionnel, ils n’en sont pas inactifs pour autant et sont souvent insérés dans la vie associative, dans des services aux autres, dans des hobbys plus ou moins prenants. Qu’ils suffise de penser au développement des universités des aînés ou au tourisme qui les cible directement. En outre, grâce à la protection sociale telle qu’elle s’est développée en Belgique et s’ils ont été épargnés par les accidents de la vie, ils connaissent souvent moins de soucis financiers que les plus jeunes. Ils ont acquis certains biens, comme leur maison par exemple, ce qui leur épargne certains frais inhérents à l’installation dans la vie des plus jeunes.


Les grands-parents, pourvoyeurs de services


Les grands-parents sont parfois fort sollicités. On fait appel à eux pour prendre les petits en charge le mercredi, le week-end, les soirées, pendant les vacances, etc. De plus, il n’est pas rare que les grands-parents se soient confrontés en même temps à la prise en charge de leurs propres parents vieillissants qui nécessitent selon les cas une aide à leur domicile, des visites au home, etc. Deux rôles parfois lourds à assumer. Dans bien des cas, au gré des séparations et des nouvelles unions, il y a en outre des petits-enfants « rapportés ». Ils peuvent apporter un plus mais aussi poser des problèmes nouveaux liés aux recompositions familiales.


Bref, le statut de grand-parent correspond souvent à l’étape de la retraite, moment dont la plupart se réjouissent parce qu’ils aspirent à la paix et veulent profiter de la vie, la réalité ne correspond pas toujours à ce rêve et est souvent émaillée de petits problèmes (les petits-enfants tombent malades et il faut assurer leur garde en urgence, en bouleversant éventuellement ses projets, il faut superviser leurs devoirs au retour de l’école, etc.) ou d’épreuves plus lourdes (les enfants se séparent, il faut leur venir en aide financièrement, un décès survient...).


Les grands-parents, un élément stable des familles


Dans une réalité faite de choses plus ou moins agréables, Il est préférable de prendre l’arrivée des petits-enfants comme un cadeau. Face à eux, on peut devenir plus philosophe, prendre du recul. Comme on ne se sent plus obligé d’avoir le dernier mot, on peut se mettre davantage à l’écoute, chercher à entendre les joies mais aussi le mal-être des enfants et des petits-enfants, à percevoir leurs souffrances. Quand on est grand-parent, on peut prendre le temps de remettre les choses à leur place et dans de justes proportions. S’ils prennent ce parti, les grands-parents peuvent devenir un port où tout le monde vient s’amarrer pour trouver un équilibre. Ils deviennent l’élément stable dans les familles, recomposées ou non. Ils replacent un fil conducteur dans des familles parfois chaotiques, en nouant par exemple des contacts avec les enfants des « ex ».
Quand les enfants se séparent...


En cas de séparation ou de divorce, la position des grands-parents est délicate mais essentielle. Il est important de ne pas juger, de ne pas prendre position. Cela apaise les enfants de savoir qu’on ne prend pas parti pour l’un ou pour l’autre. Sinon, les petits-enfants croient qu’on veut détruire l’un ou l’autre de leurs parents et ils en souffrent car, même si les reproches sont justifiés, ils aiment leurs deux parents et ne veulent pas être pris pour otages dans un chantage affectif. Actuellement, la justice reconnaît de plus en plus souvent un droit de visite [2] aux grands-parents d’un enfant, même dans les cas où l’un des parents a été déchu de ses droits parentaux. Le juge prend en compte en priorité le bien de l’enfant et considère l’importance pour celui-ci de conserver ce lien avec les grands-parents. Il existe des services de médiation, souvent fort efficaces, qui permettent de trouver un accord entre parents et grands-parents pour maintenir ce lien. Il peut arriver aussi que les grands-parents soient sollicités pour aider financièrement les petits-enfants, que ce soit pour les soutenir dans leurs études, mais aussi pour leur assurer un environnement décent que les parents n’arrivent pas à donner.


Le lien intergénérationnel


Le rôle des grands-parents est également essentiel pour faire vivre auprès des enfants la notion de lignée familiale et de transmission de l’histoire.


Les grands-parents ont eux aussi été jeunes, ils ont gardé des images typées de leurs propres grands-parents. Ces grands-parents d’alors leur ont déjà expliqué d’où ils venaient. Depuis, la société a changé. Raconter ces souvenirs aux enfants d’aujourd’hui leur permet de savoir d’où ils viennent et tant mieux si ça remonte le plus loin possible. Les enfants aiment beaucoup les souvenirs, surtout les souvenirs de guerre : ils sont étonnés, voire amusés d’apprendre comment on vivait il y a 60 ans, les histoires de famille, les exploits de l’un ou l’autre, les trains ou les avions d’alors...


Il y a aussi les tabous et les non-dits, les secrets de famille. Pourquoi ne pas en parler ? Les grands-parents actuels parlent plus facilement de leur vie, participent plus à celle de leurs petits-enfants, sont souvent plus proches d’eux, les écoutent, sont des confidents. Ils complètent le rôle des parents. Attention dans ces cas-là de respecter l’intimité des échanges et de ne pas dévoilé ce qui a été confié par l’enfant lorsque l’on est en train de parler avec ses parents. L’enfant se sent alors trahi et on perd sa confiance.


Un conseil aux grands-parents


S’ils ne sont pas confrontés à des difficultés financières, les grands-parents sont souvent tenter de « gâter » leurs petits-enfants par des cadeaux lors des Saint-Nicolas, Noël, anniversaires et autres occasions diverses. Mais les enfants sont souvent déjà couverts de cadeaux par leurs parents (parfois en double lorsque leurs parents sont séparés) et c’est parfois un casse-tête pour les grands-parents de trouver quelque chose qu’ils n’ont pas encore... Puisque les grands-parents ont parfois plus de temps disponibles, pourquoi ne pas en profiter pour offrir à leurs petits-enfants une journée spéciale au cours de l’année ? Les possibilités de visites ou d’excursions sont multiples et l’enfant choisira celle qui lui plaît le plus : le zoo, le Parc Paradisio, les grottes de Han, le Space center, le Delphinarium, le musée des enfants., etc. Cela devient alors un cadeau aussi bien pour les grands-parents que pour les enfants !


En conclusion


On n’est pas préparé à être grands-parents mais c’est une aventure qui peut se révéler extrêmement enrichissante. On y découvre une nouvelle forme d’amour, un amour différent de celui qu’on porte à son conjoint, ses parents ou ses enfants. Etre grands-parents, c’est aussi un nouveau défi et un rôle essentiel à jouer dans la vie des enfants, en particulier lorsque ses parents sont séparés [3].

 

 


[1] on consultera à ce propos l’ouvrage de Vincent Gourdon « Histoire des grands-parents », éd. Perrin, 2001, 459 p.
[2] L’article 375bis du Code civil précise en effet que « Les grands-parents ont le droit d’entretenir des relations personnelles avec l’enfant. Ce même droit peut être octroyé à toute autre personne, si celle-ci justifie d’un lien d’affection particulier avec lui. A défaut d’accord entre les parties, l’exercice de ce droit est réglé dans l’intérêt de l’enfant par le tribunal de la jeunesse à la demande des parties ou du procureur du Roi. »
[3] Texte rédigé par José Gérard. Ce texte reprend certains éléments de l’intervention de Monsieur Jean Simon, de l’Ecole des Grands-Parents Européens (EGPE www.egpe.org) lors des Midis de la Famille organisés par l’échevinat de la famille de la commune d’Ixelles, en partenariat avec Couples et Familles et différentes associations.

 

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